L’installation Bartolo di Fredi’s Bloody Gash: La césarienne et la chute de l’homme est une relecture féministe d’une œuvre de Bartolo di Fredi. Une des nombreuses fresques de l’église collégiale Santa Maria Assunta en Toscane, La création d’Ève (1356-1367), représente une figure divine qui, de la main droite, offre la bénédiction, alors que de la main gauche, elle guide Ève, figure biblique chrétienne qui, pleinement constituée, émerge du flanc ouvert d’Adam. De toute l’histoire de l’art occidentale, cette œuvre est l’une des rares où la création de la femme est présentée de façon matérielle plutôt qu’allégorique. Cette fresque et plus spécifiquement l’intervention physique qui y est décrite – est à la base de l’ensemble du nouveau corpus d’œuvres présenté à Le Lieu, centre en art actuel.
L’installation réduit la peinture originale de di Fredi à ses éléments principaux symboliques, permettant d’en compromettre le récit. En reproduisant sur un véritable corps féminin cissexuel (celui de l’artiste) l’entaille qui est visible sur la fresque, l’incision est re-contextualisée et permet ainsi de référencer les premières interventions chirurgicales par césarienne, élargissant d’autant la portée de la lecture initiale de l’œuvre pour traiter simultanément des formes religieuses et médicalisées de la création de la vie. En marquant ainsi le corps féminin des deux formes dominantes d’appropriation institutionnalisée de la reproduction des femmes, le travail de Michelle Lacombe génère également un espace dans lequel peut se manifester une relecture féministe de l’image originale.
Caractérisée par un retour engagé et radical sur le corps subjectif de la femme, Bartolo di Fredi’s Bloody Gash: La césarienne et la chute de l’homme fait une utilisation stratégique de la modification corporelle pour embrouiller les frontières entre le corps et ses diverses références, soulignant la relation incarnée de l’artiste aux histoires culturelles de la reproduction et de la création.
Depuis l’obtention de son baccalauréat en beaux-arts de l’Université Concordia en 2006, Michelle Lacombe (Montréal, QC) a développé une pratique singulière en art corporel. Son travail a été présenté dans le contexte de différents événements de performance, expositions et colloques au Canada, aux États-Unis et en Europe. Michelle Lacombe est lauréate de la Bourse Plein sud 2015. En parallèle à sa pratique en art actuel, elle soutien également l’art action et d’autres pratiques indisciplinées. Elle est par ailleurs coordonnatrice du festival VIVA! Art Action.